Maigre obstacle que la chemise contre la brûlure du café… En quelques secondes, celui-ci s’est infiltré, le noir corsé s’est approprié le blanc du vêtement, le tissu s’est absorbé contre la peau du torse.

Malgré la morsure chaude, il eut d’abord le réflexe d’entourer d’un bras la silhouette qu’il n’avait pas même eu le temps de détailler avant la collision, rétablissant l’équilibre, endiguant la surprise. « Ne vous en faites pas, je n’avais qu’à regarder où j’allais aussi, » rassura-t-il, sourire aux lèvres. Il avait gardé la main sur l’épaule de cette femme, alors il la ramena à lui, regarda enfin ce visage encore perplexe. Ses yeux tombèrent sur le journal qu’elle avait à la main – il n’avait pas échappé au café, lui non plus…

L’embarras rendait ce sourire adorable, se dit-il alors qu’il détaillait ce visage, plus attentif – il considérait ces lèvres rondes, ces yeux clairs et qui fuyaient. « Du quoi ? » demanda-t-il jouant la perplexité – et en réalité il était vraiment surpris de ce qu’elle ait instinctivement une telle proposition. Rien n’était jamais assez grave pour le pressing. « Elle ne vaut pas beaucoup plus qu’un journal, » ajouta-t-il en baissant les yeux sur sa chemise, puis la regardant à nouveau : « et ce sera au pire un prétexte pour raconter ma rencontre avec une belle inconnue. » Il sourit, voulait dissiper la gêne d’un souffle rieur – et puis il ne pouvait jamais s’empêcher ces plaisanteries courtisanes, chaque fois sincères cependant. Un jour on le renverrait à ses caresses sans doute, mais il ne réfléchissait pas à dire ce qu’il pensait, autant pardonnable peut-être en ses paroles spontanées qu'était pardonnable la spontanéité d’une maladresse…

Mais il remarquait en parlant que le journal dont il était question lui était comme familier – il reconnaissait cette page, qui impossible à lire maintenant arrachait un désespéré soupir à la jeune femme. Il la reconnaissait pour l’avoir consultée, il n’y avait pas si longtemps. « Vous cherchiez quelque chose ? »