Oh je ne savais pas ce qui m'avait pris. Non, je m'étais simplement laissé porter par le courant, mes chaussures d'un bleu électrique guidées par le rythme d'une musique sur laquelle s'était calé mon coeur. Il y avait ce garçon, là, juste devant moi. Nous échangions quelques regards indiscrets. Peut-être était-ce l'adrénaline, ou peut-être n'était ce qu'une forme d'insouciance. La vérité était que je n'arrivais plus à entendre la moindre de mes pensées, alors, je m'étais contenté de bouger, laissant mes bras s'enrouler autour de son cou alors que mon front frôlait maintenant le sien. C'était si simple.

Il s'était promis de ne plus revenir dans ce genre d'endroit. De se terrer sous une lumière électrique, dans une pièce empestant la sueur. Mais il ne peut pas aller contre sa nature. Il aime ces moments où il perd son corps, où il n'est plus rien. Juste de la chair. Il s'était promis de rester à l'air libre, de ne plus se cloitrer. Trop tard. Il est là, maintenant, à se dandiner. A échanger des regards ambiguës avec un autre homme dont il ne se souviendra même plus de la tête le lendemain, parce que la lumière déforme les traits. Il le laisse le toucher et apprécie le contact doux. Il passe ses mains sur ses hanches, sur son dos. Il ondule tendrement. Il ferme les yeux et savoure.

Ça n'était pas tant l'aspect de danger qui m'attirait dans tout ça, oh non. A vrai dire, je n'étais pas de ceux qui étaient prêts à risquer leurs peaux au moindre instant. Non, je crois que ce que je préférais, c'était le fait de ne pas avoir à réfléchir à quoi que ce soit, moi qui était toujours entrain de détailler le moindre instant. Lui et moi, nous étions là, partageant un moment qui n'était de toute évidence qu'éphémère. Il ne pouvait rien nous arrivait, non. Je me sentais invincible. Alors, mon souffle s'était délicatement dispersé contre sa peau, mes lèvres frôlant sa mâchoire alors que mes doigts caressaient avec délicatesse sa nuque. Impossible de raisonner correctement, non, mais c'était justement ce qu'il y avait de plus intéressant.

Il frisonne sous les caresses de l'inconnu. Il n'est plus que sensation. Tout son esprit est concentré sur le mouvement de ses doigts, sur leurs hanches qui se frôlent. Il respire fortement, s'accroche à l'odeur envoutante de l'homme. Ses mains se font un peu plus insistantes sur ses flancs, qu'elles longent encore et encore. Peu importe le rythme de la musique qui leur brise les tympans, il impose sa propre rythmique au corps face à lui, pressant tendrement ses mains contre les muscles savamment cachés derrière un tissu doux. Il se laisse doucement envahir par le moment, par ses lèvres qui courent le long de sa mâchoire. Il frotte son nez dans la chevelure soyeuse. Et respire encore, plus fort. Il rapproche sensiblement le corps contre le sien.

Je ne savais plus bien la raison pour laquelle j'avais mis les pieds ici. Je n'étais ni une de ces personnes qui aimaient se prêter au jeu de la foule, ni de ceux qui cherchaient désespérément à s'abandonner. Je crois que quelque part, je cherchais encore à devenir quelqu'un que je n'étais peut-être pas. Je n'étais qu'ici pour apprendre après tout, et il n'y avait pas de meilleure leçon qu'après avoir commis une erreur. Mais était-ce réellement comme ça que l'on pouvait appeler cet instant ? Une erreur ? Non, je voyais plus cela comme une sorte d'entre deux, un moment indéfini où plus rien n'avait réellement d'importance. Je goûtais à sa peau par pure gourmandise, et n'avais même pas peur de laisser le creux de ma paume épouser à la perfection sa nuque. Nos corps ne bougent plus qu'au même rythme, ne faisant presque qu'un, alors que mon souffle chaud s'éparpille là, tout contre ses pores, tout contre ses lèvres. Le bout de mon nez chatouille ainsi le sien alors qu'un doux sourire dévoile mes dents parfaitement blanches. Oh, non, je ne connaissais pas son nom, mais était-ce réellement important ? Car là, j'avais la nette impression qu'il connaissait déjà tout de moi.

Il s'était promis, entre autre, de ne plus danser contre des corps inconnus, de ne plus partager sa chaleur avec des hommes sans visages. Mais l'instant est beaucoup trop plaisant pour être rompu. Il a toujours les yeux fermés, bercé par le rythme de leurs hanches, mais aussi par le souffle de l'autre qui effleure son visage, son cou, ses cheveux. Ses lèvres. Leurs visages sont si proches. Il ne résiste pas, de son nez il caresse la peau douce de sa joue. Il hésite à ouvrir les yeux, de peur de rendre l'instant trop réel. De briser sa promesse pour de bon. Mais il les ouvre, et tombe sur le sourire si beau de son partenaire. Il ne résiste pas à lui répondre du sien. Il ressert son étreinte, et pose sa tête sur l'épaule de l'inconnu, se laissant aller à effleurer le cou de ses lèvres. Lui aussi veut goûter à cette peau fine.

C'était peut-être la première fois que j'échangeais un moment comme celui ci. bien évidemment, je ne pouvais pas mettre de côté ce que j'avais pu ressentir lorsque l'on m'avait offert mon premier baiser. Mais tout ceci était différent. A vrai dire, c'était même plutôt difficile à décrire, puisque le cadre restait des plus intimistes, alors qu'énormément de personnes nous entouraient. Peut-être était-ce cette impression que nous n'étions plus que deux dans la salle qui me faisait croire que tout le reste avait été balayé. Cette proximité presque apaisante alors que nos corps semblaient encore et toujours en transe. J'étais curieux, oui, peut-être trop même, et lorsque mon regard croise enfin celui du jeune homme, les lèvres s'étirent en un sourire. Nos corps se rapprochent toujours un peu plus, et je peux maintenant sentir la chaleur de son souffle venir taquiner le creux de mon cou, frissonnant à chaque baiser volé. Une de mes mains quitte sa nuque pour longer son épine dorsale. Mon autre main vint longer son biceps, traçant des cercles, là, tout contre sa peau, alors qu'un léger soupir s'échappait finalement de mes lèvres. Je pouvais sentir son palpitant s'échapper tout contre ma poitrine.

Il frisonne au rythme de ses mains qui longent son corps. Il a tellement conscience du moindre geste de l'autre, tout son corps devient ultra sensible. Le moindre souffle, le moindre frôlement, tout devient électrique. Son coeur se met à battre encore plus vite, toujours plus vite. Ca tape dure au creux de ses oreilles. Il a presque envie d'écraser ce corps contre le sien jusqu'à en étouffer. Il se rend compte tout doucement que le contact physique lui a horriblement manqué. Peut-être même plus que d'avoir une maison à soi. Il a envie que ses mains explorent encore son corps, qu'il n'arrête pas ses caresses, jamais. C'est trop extrême. Finalement, il se souviendra probablement de ce corps contre le sien. Son soupir résonne encore au creux de ses oreilles. Il décale son visage de quelques centimètres, pour mieux le voir, pour mieux se rappeler. Il est beau. " Salut. " Il le dit assez fort pour que l'autre l'entende, mais pas suffisamment pour briser le moment. Il lui dit ça comme s'il venait de lui tomber dessus alors que leurs corps semblent déjà se connaître. Ca détruit un peu leur intimité, peut-être, ça leur rend leur réalité en dehors de leur étreinte. Deux personnes. Deux individus. Et non un corps, une sensation.

Peut-être allions nous finir par nous étouffer l'un l'autre, mais la réalité était que plus les secondes s'écoulaient, et plus nos corps semblaient s'abandonner l'un à l'autre. C'était comme si chacun de mes membres étaient attirés vers les siens. Il ne me semblait pourtant pas avoir bu, ou du moins, nettement pas assez pour ressentir une telle attraction. Il était devenu mon centre de gravité, là, tout de suite. Mes doigts logèrent l'échine du garçon, s'arrêtant non loin de sa ceinture. La situation avait beau être cocasse, je ne restais pas moins ce Basile qui n'osait pas toujours lorsqu'il s'agissait de ce domaine, ce qui était un comble lors de cet échange, hm. Le visage du beau jeune homme se replaça devant le mien, alors qu'un Salut. retentissait. Mes lèvres esquissèrent bien malgré moi un de mes plus beaux sourires. Peut-être un peu trop naïf, oui, mais rempli d'une éternelle compassion. « Salut... » Je vins me mordre la lèvre inférieure, alors que mes prunelles océans dévoraient maintenant les siennes. Devais-je lui dire mon nom ? Devions nous réellement savoir à qui nous avions affaire ? J'avais presque peur de rompre tous contacts avec cet inconnu, alors, mon visage s'était lentement rapproché du sien, capturant ainsi ses lèvres en un doux baiser. Peut-être ne fallait-il pas, après tout. Oui, peut-être était-ce mal, mais là tout de suite, je n'en avais pas grand chose à faire.

Alors que ses yeux se perdaient dans l'océan des prunelles inconnues, il se retrouve tout à coup fasciné par cette bouche doucement mordue par des dents blanches. Ca devient beaucoup trop pour lui, il le sent. Tout son corps surchauffe. Ses neurones forment une bouillie innommable. Il ne sait plus ce qu'il doit faire, s'il doit continuer à accentuer leur corps à corps ou s'il doit arrêter l'échange avant le blackout total. La situation devient totalement incontrôlable quand ses lèvres se posent sur les siennes. L'autre a fait le choix pour lui, l'échange se prolonge, doux et en même temps crument intime. Il se laisse complètement transporté par ces lèvres. Il n'agit pas. Il ne se rétracte pas, mais il n'y prend pas part. Pourtant il sait que ça finit souvent comme ça, et qu'il n'a rien fait pour que cela ne se produise pas. Et au fond, il aime ce contact. Quand il sent qu'il va exploser, que tout le dépasse, quand il retrouve une certaine lucidité, il décolle ses lèvres, rompt le baiser. C'est idiot, c'était presque innocent, au fond. Et pourtant, il est là, comme mal à l'aise. Il ne sait pas quoi dire pour se justifier. Il a envie de se cacher, et pourtant il garde l'homme entre ses bras. Il se sent tellement idiot qu'il en rougit.

Je ne savais pas ce qu'il m'avait pris. Non, sur le moment, ce baiser m'avait semblé plus qu'approprié, sauf que voilà, maintenant que je commençais à y prendre goût, le jeune homme avait eu bien vite fait de se dérober, reculant son visage, rompant ainsi tous contacts entre nos lèvres. C'était ma faute, je le savais, et malgré la proximité de nos deux corps, un trou béant commençait peu à peu à se creuser entre nous. On pouvait même nettement sentir un léger malaise, lui ne sachant trop quoi dire, et ma canine s'enfonçant dans ma lèvre inférieure. On se met à rougir ensemble, à deux, alors qu'un léger « D-Désolé... » presque enfantin se fait entendre de ma part. « Je... j'aurais probablement pas du. » c'est qu'il ne devait pas avoir aimé, pour s'être échappé ainsi, et je me sentais tout à fait honteux de lui avoir fait subir ce châtiment.

Il soupire. Il se sent encore plus mal de rendre l'autre mal à l'aise. Ce n'était qu'un baiser après tout, quelque chose d'encore moins intime que leur corps à corps précédent. Mais Axel avait une drôle de façon de concevoir le baiser. C'était trop pour lui. Un reste de cette éducation à base de Disney où le baiser c'est ce qui vient conclure une belle histoire d'amour naissante. C'est idiot. Il soupire encore. Il ne sait pas quoi faire pour débloquer la situation. " T'inquiète pas, c'est ma faute. " Il n'ose même plus regarder l'autre pendant un temps. Il n'a pas envie que l'autre conclut qu'il est dégoûté, ou quoi. Il a encore ce corps contre le sien, et ne veut pas le quitter. Pas maintenant. Mais c'est trop tard pour retrouver leur intimité. Un instant éphémère. Soudainement il le prend par la main et l'emmène vers le bar plus loin. Il peut bien s'excuser de se comporter comme un adolescent prépubère avec un verre. " Tu veux quelque chose ? " Il se penche vers son oreille pour lui souffler ces quelques mots et il sent son coeur repartir.

Je n'en peux plus de rougir. Il faut dire que je me sentais drôlement coupable tout à coup. Ce baiser l'avait gêné, et en y repensant, j'avais moi aussi trouvé cela plutôt déplacé. Pourtant, nos corps semblaient si proche qu'il ne s'agissait presque que d'une évidence. Je n'avais jamais embrassé personne avant de mettre les pieds dans Banff. Il faut dire que par chez moi, en France, les gens ne s'étaient jamais trop intéressé à moi. Non pas que je ne leur plaisais pas physiquement, mais plutôt qu'ils m'avaient toujours vu comme un ami, un confident. Je n'étais pas celui que l'on avait envie d'embrasser. Mais ici, c'était différent, oui, je me sentais désirable, désiré, et je devais bien avouer que j'y prenais goût. Il fallait cependant que je ne dépasse pas mes limites, car je savais que je pourrais facilement le regretter. Le jeune homme m'entraine à sa poursuite, me conduisant jusqu'au bar alors que ses lèvres s'approchent à nouveau de mon oreille. « Je vais prendre un Coca. » que je lâche presque gêné. Je ne veux pas boire, non, de toute façon, je ne tiens pas l'alcool. « Tu... Tu t'appelles comment ? » C'était étrange de lui demander ça maintenant que nous venions de partager ce moment, mais je trouvais ça nécessaire. Je n'étais pas de ceux qui profitaient de quelqu'un sans s'intéresser à lui un minimum. Et cet inconnu là, il m'intriguait énormément.

Il hausse un sourcil face à la réponse de son "invité". Mais finalement, il a peut-être raison, l'alcool est la meilleure façon de finir cette soirée encore plus bizarrement que maintenant, et il n'a vraiment pas besoin de ça. Alors il commande pour eux deux un coca. Il est peut-être encore temps de se montrer raisonnable. De se montrer en adulte, pour une fois dans sa vie. Il tend son verre à l'autre. " Tiens. " Il boit une gorgée de la boisson fraiche avant de lui répondre. Oui, la situation est définitivement bizarre. Il a l'impression de faire tout à l'envers. Mais il ne peut pas échapper à la question. C'est juste son nom. Rien d'intime, en fait. " Axel. " Il a un petit temps d'arrêt. Il n'est pas sûr de vouloir mettre un nom sur ce visage. " Et toi ? " Même cette conversation banale et en tout point inintéressante devient difficile et embarrassante. Il a presque envie de revenir en arrière et de répondre à ce stupide baiser, de ne pas réfléchir. De ne pas avoir de principes stupides. Il boit encore une gorgée, pour se donner une contenance qu'il n'a pas de façon évidente.

Je n'ai jamais vraiment aimé l'alcool. Il faut dire que j'en ai gardé une plutôt mauvaise expérience jusqu'ici, alors du coup, j'ai préféré garder mes distances avec tout ce monde. Et puis c'était plus drôle être sobre. Il commanda donc la même chose et je le remerciais en un sourire. Probablement un de mes plus beaux sourires, d'ailleurs. Il s'appelle Axel. « Ça te va bien. » et puis il était sacrément beau Axel, mais ça, je l'avais déjà remarqué depuis de nombreuses minutes maintenant. Son visage me fascinait, et particulièrement cette cicatrice qui longeant sa joue. J'aurais eu envie de la dévaler du bout des doigts, mais peut-être était-ce inapproprié, je ne savais plus trop comment je devais agir. J'étais pas franchement habitué à être aussi intime avec quelqu'un. « Moi c'est Basile. » c'est beaucoup moins beau comme prénom, il fallait bien l'avouer. Mes joues rosissent une nouvelle fois alors que je lâche un timide. « Tu crois que... qu'on pourra se revoir, un jour, en dehors d'ici ? » parce que ça n'était pas franchement mon genre d'endroit, d'habitude.

Il se sent rougir. Il se gratte l'arrière de la nuque. Après tout ce qu'il a touché de sa peau, le voilà qui se met en panique juste pour un compliment. Un compliment sur son prénom. Il se demande brièvement qu'elle est le critère objectif de l'adaptation d'un prénom à la personne, mais il abandonne rapidement sa réflexion stupide. " ouai, ba, merci. " Le gars a vraiment des yeux fascinants, et encore, il ne l'a pas vu sous la lumière du jour. Peut-être scintillent ils encore plus. Peut-être sont ils encore plus bleu électrique. " Basile … " Il répète comme pour s'en imprégner, sans souvenir plus tard, lorsqu'il rencontrera une nouvelle fois le lagon dans son regard. Il hausse les épaules face à sa question, et tente un sourire moins tremblant, sincère. Celui d'un ami potentiel. " Oui, bien sûr. J'veux dire, t'as l'air cool. " Il se mord la lèvre pour s'empêcher de dire des trucs encore plus bêtes, franchement, plus ça va, plus il s'enfonce. Il boit encore. Il tente de se rattraper, de paraître moins attardé. " T'es depuis longtemps sur banff ? Ou t'es que de passage ? " Juste pour savoir si ce jour prochain sera le seul, ou s'il peut compter sur cette rencontre pour se sentir encore mieux ici, encore plus partie intégrante des murs de la petite ville.

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