un plein d'essence s'impose à toi quand la jauge de ta voiture penche dangereusement sur le côté 'empty' du réservoir et aucune autre solution n'est que de t'arrêter à la prochaine station essence. tu commences à remplir le réservoir sans surveiller le compteur, attendant le 'clac' annonçant le remplissage complet du réservoir. celui-ci arrivé, la pompe continue de se vider de son essence malgré que tu aies lâché la poignée, et le compteur continue de tourner à vitesse grand v. génial. tu souffles, ton jean est trempé d'essence maintenant. tu te diriges vers la boutique annexe, sommant au passage à ton chien de garder la voiture, et pousses la porte d'entrée. dites, on a un problème avec la pompe et.. hé, y a quelqu'un ? aucune réponse ne te parvient et la boutique est vide. tu désespères. cette ville est complètement déserte visiblement.

tu es là, et tu observe. Lolita a besoin d’essence, pour avancer, et pour te réchauffer aussi. les nuits ici ne sont pas des plus chaudes, alors tu es là, assise dans le noir, derrière les arbres, cachée, deux bouteilles à la main, et tu attends. tu attends que quelqu'un laisse des centimes de trop, que quelqu'un oublie de prendre les dernières gouttes d'essence. là, tapis dans le froid. tu as déjà ramassé un fond d'essence, comme ça, mais ce n'est pas assez, tu le sais. tu observe la scène, et la pompe à essence se transforme en cascade. tu aurais pu courir pour remplir tes deux bouteilles, mais un chien tiens la garde, et un motard n'est que trop près. alors tu reste là, et tu attends le bon moment pour bondir. tu observes.  

un mec débarque avec sa moto et tu le regardes. toi aussi t'aurais aimé avoir une moto, mais avec le chien, ça s'avère quelque peu compliqué. tu le regardes, puis regardes ton jean imbibé, puis la pompe qui continue de faire des siennes, puis à nouveau le type face à toi. le problème est évident, pourtant. la pompe est cassée, et y a personne dans c'trou à rats. t'aurais pu partir sans chercher à comprendre, sans payer, mais t'es un peu honnête, quand même.

tu fronces les sourcils, ne comprenant pas réellement le rapport entre la pompe et ton arrivée, mais soit. tout ne fait pas de sens dans la vie, visiblement. je viens juste d'arriver, ouais. tu le regardes faire son truc magique avec la pompe, qui s'arrête de couler. ben, j'suppose que je devrais sans doute faire d'autres pleins alors si tu veux bien me montrer, c'est cool, ouais. ouais, t'aurais pas trop envie de te retrouver avec de l'essence partout à chaque fois que tu viens puisqu'effectivement, tu comptes rester un moment indéterminé ici, à banff. tu finis par ouvrir la portière de ta voiture pour que ton chien sorte, fasse ses besoins, attendant que le motard t'explique, chien qui s'empresse de partir en courant vers les arbres.

les chiens, t'en a pas peur, au contraire, même, ils t'aiment plutôt bien. c'est d'ailleurs sans manquer sur le chien de ce type. toi, tu essaie juste de découvrir la magie de cette pompe à essence pour te servir ensuite, mais voilà que ce chien arrive et te renifle. c'est ta chance, ça, un chien. tu pose ta main sur la gueule de la bête pour qu'il aille voir ailleurs, mais on dirait bien qu'il est têtu. tu te décale alors vers la droite, mais il te suit. tu soupire et lui offre quelques caresses en espérant qu'il te laisse tranquille, mais c'est qu'il est gourmand. finalement, tu n'a plus qu'à attendre que son maître le rappelle.

tu l'observes, le motard, t'expliquer comment faire, et tu mets bien au passage la technique, point par point, ancrée dans ta mémoire. le boulon, la clé, c'est le boulon. tu lui souris, légèrement, pas trop non plus, n'ayant plus tellement l'habitude de le faire, légèrement est déjà suffisant, c'est déjà là un énorme effort de ta part. merci, c'est sympa. au fait moi c'est skip. tu lui tends la main, essayant d'être un minimum sociable, pourtant tu te sens loin d'être crédible. alors tu récupères finalement la pompe et la repose dans son encoche, puis attrapes des serviettes à ton tour pour t'essuyer les mains, et même les avant-bras. oh, j'en achèterai un autre pour le remplacer. tu hausses les épaules, l'essence sur un jean, ça reste et de toute façon, ce n'est pas comme si te payer un nouveau jean te ruinerait, loin de là. et ton chien, ton chien ça fait un moment qu'il n'est pas revenu, alors qu'habituellement, il revient directement après ses commissions. alors tu siffles, une fois, deux fois, trois fois, et pas de réaction. où il est passé encore lui ? tu râles. eh, au pied ! tu lui cries, au chien. peut-être qu'il reviendra, ou peut-être pas.

ulliel. tu vas essayer de retenir, de l'encrer dans ta petite tête histoire d'être une minimum sociable et de t'en souvenir si jamais tu viens à le croiser à nouveau dans banff. tu te sentais un peu bête de ne pas t'en souvenir, et puis, tu l'appellerais comment alors ? 'le type de la station essence' ? 'le motard' ? non, ça serait malpoli. t'es pas très sociable, mais t'es un minimum poli, quand même. des fois. tu l'es bien plus que tu ne l'étais avant, en tout cas. puis tu cherches le chien. le chien qui a disparu dans les arbres. tu le siffles, tu lui sommes de venir au pied, mais rien, il ne vient pas, et ne jappe pas non plus. tu reportes ton attention vers ulliel. en fait, non, il n'a pas de nom. tu t'sens bête maintenant, mais quand tu l'as récupéré, ce chien, tu t'y es attaché mais t'as pas pensé à lui donner un nom. ça ne t'semblait pas si important que ça, puis de toute façon, tu n'en avais même pas l'utilité, il ne s'éloignait jamais de toi. jamais, sauf aujourd'hui. t'es dans de beaux draps maintenant, skip. alors tu continues de siffler, comme si c'était normal d'avoir un chien sans nom.