tu souffles un bon coup et tu poses ta main sur la clanche de la porte. tu ne sais absolument pas ce que tu vas découvrir derrière celle-ci. un cagibi. ça résume plutôt bien la situation. l'évènement commençait fort avec une telle proximité. accepter de faire des choses sur un coup de tête, tu devrais sérieusement penser à arrêter. le principe de ce speed dating est pour le moins peu conventionnel. à Banff, tout sort de l'ordinaire. tu t'étais dis que ça te ferait pas de mal, de rencontrer du monde, mettre des noms sur les visages que tu as possiblement croisé dans la rue. idée à la con, oui. tu lèves les yeux au ciel, exaspérée de toi-même. quelques secondes après avoir pénétré dans cette pièce aux dimensions de placards à balai, ton rendez-vous express entre à son tour. tu ne distingues pas grand chose mais tu remarques des cheveux longs. c'est donc une fille que tu allais devoir embrasser avant même de commencer à lui parler. qu'importe, une fille, un garçon, pour toi, ça revenait au même. lui laissant quelques secondes pour s'acclimater à l'endroit confiné et minuscule, tu évites de trop gamberger et tu te penches vers elle et lui dépose un baiser sur les lèvres, aussi furtif et décontracté qu'il était possible de faire puis tu te recules (dans la mesure du possible dans cet endroit minuscule) « à être ici j'ai un peu l'impression d'avoir jouer au jeu de la bouteille avec des ados boutonneux » déclares-tu, faussement à l'aise, tentant de détendre un peu l'atmosphère. « je m'appelle Alexie mais tout le monde me surnomme Alex » et ce que j'fous là ? aucune idée.

Spoiler:

Un dressing ? Génial, personne n'aurait rêvé de mieux comme endroit pour faire une rencontre. Foutues chaussures entassées par dessus d'autres boîtes qui prennent toute la place. La pièce est drôlement étroite, je suis pratiquement collée à l'autre personne qui se trouve en face de moi. Une règle est une règle. Mais embrasser une fille n'est pas une épreuve pour moi. J'en suis pas à ma "première fois". Je lui adresse un sourire amical avant de poser mes lèvres sur les siennes, délicatement.

c'est un univers extrêmement féminin, tu ne sais trop pourquoi mais tu trouves cela très sensuel. tous ces vêtements, que la plupart passent trois heures à choisir, pour la tenue parfaite, la tenue inoubliable. c'est étroit, la chaleur monte naturellement, les cheveux de la jeune femme viennent te caresser l'épaule et un frisson te parcourt. doucement, ses lèvres pulpeuses rencontrent les tiennes, dans un doux baiser, un lent. un baiser tout en féminité.

Je ne fais pas durer le baiser. Je ne voudrai pas la mettre mal à l'aise et on n'est jamais trop prudent avec les personnes qu'on ne connait pas. Un doux sourire aux lèvres, je m'éloigne légèrement d'elle, mais mon dos rencontre vite l'un des murs de la petite pièce. C'est étrange, les choses ne se font pas particulièrement dans l'ordre ici ; le baiser avant les présentations. « Moi c'est Nala. »

à peine éloignées, déjà au plus loin possible. la pièce est si petite que c'est obligé d'être près de l'autre. tu ne peux voir la demoiselle dans un ensemble de sa personne, tu te focalises automatiquement sur des détails : ses cheveux, ses yeux, sa bouche.
un sourire t'échappe à son prénom, il te rappelle ton enfance. tu te demandes vaguement si c'est une lionne alors, si elle dévore les gens, si elle griffe ou fait patte de velours.
« enchantée. Lova. »
souffles-tu. légèrement, s'envolant.
« étrange comme manière de rencontrer les gens. et puis, à la fois spontané et prémédité. t'en penses quoi ? »

Lova. Quel prénom si doux et agréable à entendre. J'crois que j'aurai aimé un prénom pareil, un prénom délicat comme le sien. Elle a pas tord, la situation est plutôt originale. Moi ce qui me fait vibrer dans cette petite aventure, c'est de ne pas savoir sur qui on va tomber, dans quel endroit on va se retrouver. C'est excitant non ? « C'est dans les situations les plus cocasses que se font les meilleures rencontres. » Je la fixe, un sourire amical aux lèvres.

« testées et approuvées. »
tu rigoles, te remémorant les personnes que tu as pu rencontré. bien souvent par hasard, toujours d'une manière incongrue. tu te demandes d'ailleurs s'il y a un type de rencontre "normal" ? ça serait idiot, c'est deux âmes différentes à chaque fois, rien ne peut être habituel.
tu regardes à nouveau le visage de Nala, sans arriver à définir si elle est pure douceur ou si elle cache des choses. t'en un peu en doute.
« enfin, les situations improbables. la rencontre par un baiser, c'est nouveau. »

Y a un je n'sais quoi qui se dégage d'elle. Quelque chose d'apaisant et qui vient défier ma fougue naturelle et mon impétuosité. J'ressens pas l'ardeur de montrer que j'ai mon caractère, que je sais me défendre et que je n'ai besoin de personne. Mon rire fait échos au sien, riant tout simplement parce que l'envie y est. Pas forcément besoin d'une excellente raison pour rire. Juste d'un bon partenaire. « Faut bien une première fois à tout. » Mon visage s'illumine, telle une gamine.

le jeu a imposé son atmosphère, vous retombez vraiment en adolescence. innocentes et insouciantes. t'aimes la gaminerie contagieuse, tu penses que c'est la meilleure maladie. maladie parce que c'est dangereux, on devient plus vulnérable, mais c'est tellement drôle de jouer aux enfants, de retrouver la malice dans les yeux, le rire éternel et la joie dans nos cœurs.
« tu devrais redevenir une enfant plus souvent. »
c'est une confession. parce que tu le vois, à ne rien voir, tout ce qu'elle cache, ce qu'elle endure. elle lutte contre la vie, contre les gens au lieu de se laisser porter. tu dois vivre, Nala.

Moi qui avais peur de ce que pouvaient donner ces speed dating, je suis finalement soulagée. Soulagée, oui mais de quoi ? J'sais que les gens ne mordent pas parce que c'est moi d'habitude qui les fait fuir. Peut être soulagée de découvrir finalement que moi aussi, je sais être un peu plus posée. Moins dans les extrêmes. Je souris à sa remarque. « Pour ça, il faudrait que je croise les bonnes personnes plus souvent. » Les personnes comme toi.

juste un sourire amical. tes pensées sont bousculées par l'ouverture de la porte de ce dressing. ça fout un peu la frousse, éblouie par la lumière d'un coup, l'ombre d'un homme se dessine, bloquant tout accès dehors. heureusement, il se présente bien vite comme étant l'homme de ménage. on était à peine à l'aise à deux dans cet espèce de placard, impossible que ce pauvre homme fasse son travail s'il on reste là.
tu prends la main de Nala et tu l'entraines juste deux trois pas plus loin, un peu plus dans la réalité, sans trop couper le moment quand même.

Ce retour en enfance me fait du bien, elle a raison. J'ai l'impression d'être dans une petite bulle. Mais une bulle c'est éphémère, c'est fragile... Un homme rentre. Il la fait exploser. Il fait exploser ma bulle. Ah, c'est celui qui fait le ménage. Pendant un instant j'avais oublié qu'on était dans des speed dating, y a toujours des pauses dans ce genre de choses. Silencieuse, Lova m'attrape la main et m'entraîne un peu plus loin. Ici c'est mieux. Ici y a plus d'espace, plus de lumière. « Pourquoi tu t'es inscrite à ça toi ? » Je ne cesse de sourire et mon ton se fait toujours aussi doux. J'me surprends moi même.

Spoiler:

t'as un peu dompté la lionne. ça te fait doucement sourire, tous ces métiers inventés de la vie.
« pour les rencontres. pour les lieux. »
pour être à l’abri, pas toujours dehors, par ce froid. va falloir penser à te trouver de nouveaux vêtements jolie poupée, ou un lieu où te poser. dormir à la belle étoile, c'est plus possible, ton corps fatigue et se glace au fil des nuits.
« et toi ? »