Il prit une longue taffe et regarda autour de lui. Quel endroit... Il lui arrivait de se demander ce qui lui avait pris de venir ici. Un enchaînement de choses, sûrement. Un ras-le-bol général. Il ferma les yeux longuement alors qu'il savourait la saveur de la cigarette. Quelle connerie, aussi, la cigarette. Sortant de ses pensées, il se décida à entrer dans ce parc. Pour qui, pour quoi ? Peu importait. Tout ce qui importait c'était la sensation du vent sur sa peau, la fumée qui s'échappait de ses lèvres, les rayons de soleil qui peinaient à apporter un peu de chaleur, les gens. Les gens autour. Eux. Et moi. A quoi bon... Il continuait d'avancer, puis dans une maladresse qui lui ressemblait tellement, il fit tomber le sac de courses qu'il portait. Il fit un effort immense pour se baisser se demandant pourquoi il eut fallut que la terre soit si basse. Quand il se redressa, une paire d'yeux le fixait intensément. Salut.

elle avait encore passé une soirée à faire n'importe quoi. à se retourner le cerveau. ivresse quand tu nous tiens... et elle s'était réveillée avec une douce envie de prendre l'air. elle était passée prendre un thé dans un café, elle se demandait pour la énième fois pourquoi on appelait ça un café alors même qu'on y servait aussi bien du thé que des menthes à l'eau. puis elle marchait son thé à la main et sa cigarette dans l'autre à la recherche d'un coin paisible. elle arriva dans ce parc et à ses pieds tomba un homme qui ramassa tant bien que mal le contenu du sac qu'il venait de faire tomber. elle n'eut même pas le réflexe de l'aider. ce n'était pas parce qu'elle était malpolie, c'est seulement parce qu'elle était figée. elle le scrutait, l'observait et puis ses yeux rencontrèrent les siens. il s'était relevé. elle lui sourit. c'est tout. elle ne dit rien, elle se contenta seulement de sourire.

Ils se fixèrent quelques secondes. Mais Lyndon ne dit mot. Il tira une dernière fois sur sa cigarette. Il faudrait qu'il pense à s'acheter un autre paquet sur le chemin retour. Il laissa tomber sa cigarette au sol et l'éteignit du pieds. Tout cela, sans la quitter des yeux. Il prit son sac de cours dans la main gauche et passa son bras autour des épaules de la jeune fille. Ils se mirent alors à marcher un moment sans rien dire. Il apprécia juste la situation. Il venait tout juste d'arriver, et déjà il avait le bras autour des épaules d'une fille qu'il ne connaissait ni d’Ève ni d'Adam. Deux inconnus marchant vers une destination commune, qui savait après tout ? Tout le charme de la vie était là. Juste à ce moment précis, il aimait la vie.
«Lyndon.» dit-il doucement, ne voulant pas briser l'atmosphère qui s'était installée entre eux.  

elle avait l'air bête debout devant lui. elle aurait pu se baisser et l'aider à ramasser et au lieu de ça elle le regardait s'agiter sous son nez. et puis il se releva et là, leurs yeux se croisèrent. il avait des yeux magnifiques. c'était plaisant de plonger son regard dans le sien. elle aurait pu rester des heures face à lui, à scruter ses yeux. mais il décrocha son regard et vint passer son bras autour de son épaule. le contact de sa main sur son épaule la fit presque sursauter. il aurait pu passer sa route, ou bien encore lui faire remarquer que son aide aurait été la bienvenue, mais au lieu de ça, il la toucha. il se mit à marcher et elle fit de même. il la guida, à travers le parc. elle se sentait bête, elle avait les deux mains prises. sa cigarette se consumait toute seule. elle la regarda d'un coin de l'oeil, puis la jeta à son tour. il lui dit son prénom. elle sourit. ça sonnait bien lyndon. elle n'avait encore jamais connu de lyondon. et rien que de penser à ça la fit sourire à nouveau. mj dit-elle à son tour. c'était un surnom qu'on lui avait donné, et depuis elle ne le quittait jamais.  

«Mj.» répéta t-il doucement en regardant droit devant lui. C'était sûrement un surnom. Mais il s'en contenterait pour le moment. Il y avait quelque chose de nouveau, d'incroyablement étrange et incompréhensible entre eux deux,  à ce moment même. Une espèce de fusion que Lyndon n'arriverait à expliquer par aucun mot. Il aurait fallu en créer un pour décrire l'instant présent. Une sensation bizarre lui chatouilla l'estomac. «Dis moi, Mj,» répéta t-il encore avec une douceur qu'il ne connaissait que trop peu, « Ca ne te fait pas peur de te promener avec des inconnus comme moi ? » finit-il par demander ? Il ne savait pas trop quelle réponse attendre, quelle réponse il voulait entendre. Ils continuaient de marcher lentement  travers le parc évitant les éclats de joie - ou de tristesse - qui pourraient venir se heurter à leur bulle protectrice. Les bruits autour n'étaient que flou. Il n'y avait qu'eux deux, cette sensation et la route devant eux.