Le bruit du silence et le murmure de l'eau, et toi Abby. Toi fée de l'eau. Toi enfant sauvage.

tu te tiens debout, au bord de l'eau. une fille au loin. tu aimerais sauter, ne faire qu'un avec mère nature.

Tu sais pas si ça se fait, de glisser dans l'eau, comme ça. Au loin, tu distingue l'ombre un peu flou d'un personnage lointain. Homme, femme. Plutôt homme. Tu devrais peut être lui demander. Tant pis. Le temps s'arrête, et tu fais glisser ton pantalon le long de tes jambes. t'as jamais été le genre de princesse qui jouait a transgresser les règles. Mais là oui. Le vêtement heurte le sol, et délicatement, du glisse ton pied dans l'eau, noie ta peau. C'est froid ou brûlant. t'arrive pas à savoir. Quand l'eau t'arrive au genoux, tu jette de nouveau ton regard là où se tenait l'inconnu un peu plus tôt. Dis moi l'ombre, où est ce que t'as disparu ?

au final, tu t'es dénudé, gardant ton sous-vêtement, et t'as sauté dans le lac gelé. t'as la chair de poule petit rouquin. ça y est, tu te sens libre, léger. tu remontes violemment à la surface, à bout de souffle.

Les cris de l'eau, sa réapparition, et te voilà vivante. Au bord de tes lèvres, tu laisses s'échapper le rire avant de glisser a ton tour la totalité de ton corps dans l'eau. Noyer les doutes et les questions. Profiter de l’insouciance que ce nouveau compagnon de jeu semble partager. Alors a la force de tes bras, tu t'approches de lui, sirène silencieuse. On a le droit de nager là ? Tu murmures pour qu'il soit le seul a attendre. Vous ne devez pas être vu. C'est le jeu.

sa murmure, tel un souffle dans le cou, un mot qu'on glisse à l'oreille. secrète, personnelle. tu plonges ton regard bleuté dans le sien. je ne sais pas, et à vrai dire, je m'en fiche. la nature est tienne, la nature est mienne. mes paroles ne sont pas dures et insensibles pour une fois. je retourne sous l'eau quelques secondes pour réapparaitre, en vie.

Bleu. Le bleu du ciel, le bleu. Au dessus de tout, le bleu de ses yeux. Troublant, t'en reste muette. Qu'il coule, ses yeux le sauveront de la noyade. Il réapparaît, tu le fixes toujours, peut insistante, tu sais pas trop. Tu sais pas trop non plus comment tu devrais faire pour faire bien. Alors t'observe en gardant la pointe de tes pieds tendue pour t'éviter de passer la tête sous l'eau. Vos yeux, ils sont... Quoi Abby ? Bleu, beau, vrai ? T'es conne.

tu hausses un sourcil à ses mots. puis tu cesses de la fixer comme ça, t'es qu'un idiot. tu bats toi aussi doucement des pieds pour ne pas couler. tu attends la suite de sa phrase, même si tu connais déjà la réponse. bleus. ou alors, vide. comme ton âme.

Beau. Vos yeux sont beaux. Aussi loin que tu puisse remonter dans ta mémoire, t'as jamais vu des yeux comme ça. Tellement beaux et bleus que ta peur de t'y noyer. L'océan dans ses pupilles. Alors tu lui souris, avec toute l'innocence dont t'es capable, et tu t'écarte, t'approche du rivage et te hisse dessus a la force de tes bras. Maintenant t'as froid. Alors pour tromper le vent, tu cherches du regard l'océan.

à ses mots, son regard, ton corps est parcouru de frissons. puis l'innocence prend le large et toi tu te noies, encore quelques secondes et nage jusqu'à la berge. tu te isses hors de l'eau. ton grand corps, ton frêle corps devient vite violace. c'est moche mais tu as froid. vivement un de ces rayons de soleil qui réchauffe le cœur. tu aurais un nom ? tu parais idiot, on dirait un gamin de quinze ans. qu'est-ce qui te prends ?

Tu te sent petite, toute petite à côté de lui, alors tu relève la tête pour mieux le voir. L'ensemble de son visage, tu peux pas y faire attention, parce qu'au milieu, y a ses yeux. Du coup, tu te protège, tu détourne le regard, enlace tes jambes avec tes bras pour te réchauffer. Abby, mon prénom c'est Abby. Le visage contre tes genoux, tu lui souris puis brusquement tu te lève. Toi, c'est quoi ton prénom ? T'attend pas sa réponse que déjà tu cours, tendant l'oreille pour entendre la douceur de ses mots. Mais t'as froid. Alors sur le sol, tu récupère ton pantalon. T'aime pas avoir froid.

c'est joli, abby. tu connaissais une abby, mais ça remonte à loin. beaucoup trop loin. un frisson te parcourt le corps, tu vas finir par tomber malade. toi aussi, tu cours rejoindre tes affaires. je m'appelle dino. tu esquisses un sourire éphémère.

sans trop réfléchir, tu t'empares de sa main. elle est si petite dans la tienne. tu la regardes, elle a l'air si calme, elle respire tellement la douceur, l'innocence. tu rompt le contact. de même abby. tu te rhabilles entièrement, ça te fait un bien fou. tes joues se rosissent légèrement.

Cet océan au joli prénom, tu le trouve étrange, peut être mystérieux, et absolument pas causant. Parles Dino que tu voudrais lui hurler. Pourquoi tu parles pas ? Pourquoi tu fais pas comme tous les autres qui prennent les devant, posséder par ce besoin d'impressionner l'autre ? Dino semble différent, et toi Abby, tu l'observes comme on observerait une espèce inconnue. Le visage incliné, surprise pas tant de réserve. Puis dans ton genre t'es pas beaucoup mieux. Tu sais pas parler aux gens. Beau bordel.

tu remarques rapidement qu'elle t'observe avec curiosité, ça se voit dans ses yeux, ça se lit sur sa bouche. tes yeux s'écarquillent un peu, légèrement, un bref instant. tu clignes des paupières, passe un main dans tes cheveux roux. tu dégluties. euh. tu viens ici souvent ? que lui dire d'autre ? t'es pas fait pour les grands discours toi. t'es plus dans les actes, ça a plus d'importance que les mots.

Les mots c'est toujours compliqué, les mots tu sais jamais où faut les mettre, quand est ce qu'il faut les dire. Tu voudrais apprendre mais les gens ont jamais eu la patience de le faire. Non, c'est la première fois. Et puis le lac était beau, il donner envie de s'y baigner. Finalement, tu l'abandonnes, le quitte du regard, et tu t'assoie en tailleur sur l'herbe humide, tes doigts s'emparant délicatement d'une pâquerette abîmée. Et toi ? T'es là depuis longtemps ?

je la suis un peu, t'assoies à ces côtés. tu te sens bien là, en sa compagnie. c'est tellement rare pour toi ces moments-là, où tu te sens bien, apaisé. tu soupires, effleure l'herbe de tes grands doigts. non. tu soupires, pense au pourquoi du comment. je suis arrivé ici il y a quelques jours.

Du bout des doigts, t'effleures sa main alors que tu cherchais l'herbe, la douceur humide. Tu fuis, tes doigts s'échappent et viennent se refugier contre ta cuisse. Maladresse imbécile. Ca se voit. C'est pas méchant hein. Mais t'as pas l'air d'être là depuis longtemps. Ca se voit parce qu'il a encore l'air perdu, l'air de se chercher. Il finira par trouver. Tout le monde finit par trouver.

à son contact, tu retires ta main. c'est bizarre, d'ordinaire t'aurais limite réagit mais ce moment différent. tout est différent. j'suis marqué par la route. il baisse le regard, c'est dur pour lui d'être loin. mais bon, c'est bénéfique.

Des histoires, Dino doit avoir un tas d'histoires a raconter. Parce que la route, c'est ce qu'il dit, la route. Cette rencontre sera belle, parce que les gens marqués sont beaux. Tellement beaux parfois. Alors tu cherches son regard, tu cherches le sien. Ses yeux-océans qu'on du voir tout un tas de choses. La route ? D'où tu viens Dino ?

elle te cherche du regard mais toi, tu l'évites. tu soupires et lève enfin la tête. je viens de loin, trop loin. tu n'veux pas que ton passé te rattrape mais en parler pourrait sûrement te libérer. tes démons te guettent, tu aimerais les tuer, les empaler, les noyer. te noyer. pourquoi ? pour oublier. j'ai parcouru la planète. tu le regardes, tu ne sais pas si elle a fait de la route la petite abby, tu ne sais rien. alors tu lui imposes un et toi ? pour en savoir plus, doucement, agréable.

T'as peur Abby, t'as toujours peur de l'idée de partir. Le changement a un goût terrifiant, une couleur inquiétante. T'osais pas. Encore maintenant, tu sais pas comment t'as fais, pour partir. Changer de chemin, marcher en travers de ceux qui s'imposaient à toi. Dino, t'envie cette manière qu'il a de parler la route avec détachement. Il semble libre, sauvage. Et tu vas continuer, la route, ou tu t'arrêtes ici ? Ta voix est un murmure, pour ne pas gâcher les choses. Je viens de moins loin surement. Et la planête, je la connais pas. Ca a l'air fabuleusement beau. De ta poche, tu sors une cigarette que t'allume entre tes lèvres. c'est surement bête, mais ça occupe les blancs, ça brise les silences.

elle a royalement ignoré ta question, mais c'est pas grave. tu peux pas lui en vouloir, c'est comme ça, c'est bizarre, inexpliquable. c'est qu'elle est curieuse. t'es hésitant, t'es pas du genre à te dévoiler. mais bon. tu penses qu'avec elle, ça risque rien. elle a pas l'air de juger. je la continuerais, un jour ou l'autre mais pour l'instant, je profite de ces lieux magiques. la planète, oui elle est fabuleuse, magique. c'est ... wahou. c'est les gens qui la rendent moche, parce que t'en as vu des trucs moches, sales, malsains, morbides sur ta route. ton regard se troublent. non, pitié, pas maintenant. pas comme ça. tu n'veux pas y penser.

Spoiler:


Il a raison, cet endroit est magique. Le lac, l'irréel de chacun des endroits qui composent la ville. Tu voudrais lui demander de te montrer, un jour, les voyages. mais tu veux pas t'imposer. Tu veux pas qu'il prenne peur et qu'il s'en aille. Alors tu te contente d'écouter et de sourire, en réponse aux jolis mots qu'il prononce. Ils t'emmènent ailleurs, ils transportent. T'imagine des choses, mas des choses belles uniquement. Les choses sales rendent tristes. De nouveau, tu glisses tes mains das l'herbe. De là où je viens, les gens voyagent pas. Les gens ont peur de la route parce qu'ils la connaissent pas. Tu soupir. Moi ça m'énerve. Toi tu sais, est ce qu'elle fait vraiment peur la route ?