tell the world i'm coming home.
 
let the rain wash away
 
all the pain of yesterday.

 
à moitié débraillée, tu fais peine à voir. tu ne sais même pas où tu es, tu ne te souviens plus de rien. ta mémoire te joue des tours, elle gagne, comme à chaque fois, au lendemain d'une cuite réjouissante à court terme, atroce au petit matin. les cheveux en bataille, le cœur encore sourd du vacarme de la veille, toi, Alexie, t'es allée en boîte de nuit ? un grand pas pour l'humanité, faut croire. tu entends de l'eau couler, la douche dans la salle de bains juste à côté. mais chez qui es-tu ? le mystère reste entier, tu tentes de rassembler ton esprit, tes idées, tu regardes autour de toi, mais la Terre semble trembler, tourner, s'agiter autour de ton corps fatigué. tu te meus difficilement de ce dessus de lit confortable pour finalement t'asseoir, en tailleur, la tête entre les mains. une femme, un homme, plusieurs personnes, tu ne savais pas qui vivait ici, tu ne t'en souvenais pas, encore moins de son prénom si elle ou il te l'avait dit et le trou noir ambiant n'allait pas aller en s'arrangeant tant le tambourinement entre tes tempes devenait oppressant. ton royaume pour une aspirine et pour qu'on t'explique, calmement, ce que tu fais ici.

putain mais qu'est-ce que t'es naze ce matin. t'as pioncé sur le vieil canapé de la chambre. t'as le dos en vrac et l'eau qui coule sur ta tête est froide. la chaudière a décidé d'en faire qu'à sa tête ce matin. journée de merde en perspective. tu soupires, l'eau dégoulinant sur ton maigre corps de rouquin. tu peux voir toutes les pores de ta peau tellement t'as la chair de poule. t'entends le lit grincer. ah ouais merde, t'as ramené cette fille hier soir. elle vient juste de se réveiller sûrement. et c'est aussi pour ça que t'as abandonné ton pieu. tu coupes l'eau, te sèches, enfile un court mi-cuisse et un marcel trop grand. tu sors de la salle de bain qui mène direct à ta chambre. elle est là, en tailleur sur ton lit. tu la regardes sans rien dire.

it's. oh. so quiet.

tu refermes les yeux, avec un peu de chance tout ceci n'aura été qu'un cauchemar et tu te réveilleras bien au chaud dans ton lit, l'esprit frais, libéré sans l'impression d'avoir une bombe à retardement entre les tempes. tes paupières délicatement se referment, tu fais le vide autour de toi et tu ouvres à nouveau tes prunelles hésitantes entre vert et gris. tentative vaine de retour à la normale. tu poses alors tes deux billes de couleur sur le garçon qui vient de se dévoiler dans l'embrasure de la porte. tu te souviens vaguement de son physique, surtout de ses yeux, un bleu profond, hypnotique. moue dubitative, tu laisses ton regard dériver sur lui sans gêne particulière avant d'extirper une cigarette de la poche de ta veste qui gît sur le lit. la glissant entre tes lèvres, cherchant ton briquet, tu as comme un sursaut de savoir-vivre, tu retires la cigarette de tes lèvres et pose à nouveau le regard sur ton hôte inconnu « j'peux fumer chez toi ? » il pourrait te foutre à la porte de son appartement, te balancer à ta tronche déterrée tes quelques affaires qui jonchent le sol de sa chambre, mais qu'importe, tu lui squattes déjà son lit, tu vois pas ce qui pouvait arriver de plus gênant.

oui. de toute façon, je m'en fiche, je compte rester ici toute ma vie, c'est impossible. j'ai toujours besoin de bouger. la routine, rester figé, c'est pas fait pour moi, ça me tue à petit feu, tout doucement. c'est horrible. tu te sors toi aussi une cigarette, ouvre la fenêtre. tu tires dessus comme si c'était la dernière que tu t'autorises à fumer. pas trop mal au crâne ?

firework.

 
fatiguée, les traits tirés, tu t'es réveillée ce matin sans savoir où tu étais et sans savoir où tu irais. mais si on essaye de t'organiser une vie rangée, dirigée, dictée, tu oublieras vite ce qui te caractérise, la liberté. une musique aux accords improvisés, aucune partition, du feeling et c'est tout. après l'acquiescement du garçon, tu reportes le mal incarné à tes lèvres et tu demandes intérieurement à tes poumons de te pardonner mais c'est comme ça, t'as besoin de la bouffée de chaleur qui t'envahit à chaque fois que tu tires sur la mort. tu soupires et comme si ta première taffe t'avait donné du courage, tu te traînes toi aussi jusqu'à la fenêtre, pour respirer ? triste contradiction avec la nicotine qui s'engouffre dans tes voies respiratoires. mal au crâne ? l'euphémisme. « c'est le quatorze juillet dans ma boîte craniène » en référence à tout le tapage des feux d'artifices qui rythme la fameuse fête nationale française. étrange maladie que la gueule de bois, fièvre artificielle qui explose en dégâts ephémères.
 

tu la regardes, elle est quand même plus jolie que la veille. oh fait. tu tires sur ta cigarette, puis chasse le démon. pour info, fais comme chez toi. tu dis ça, posément, comme d'hab. sans aucune émotion, ni dans ta voix, ni sur ton visage. tu plonges tes yeux océan dans les siens. t'étais pas aussi accueillant, avant. t'étais même sauvage, tu l'es toujours mais dans ta tête. t'essaies quand même de faire des efforts mais ça se sent un peu, que c'est pas naturel.

Spoiler:

mystery machine.

tu ne le connaissais ni d'Eve, ni d'Adam ce garçon, juste un vague souvenir trop arrosé sans doute. et voilà qu'il mettait son appartement à ta disposition. politesse exacerbée ou réel je-m'en-foutisme, son attitude n'en était pas moins étrange à tes yeux mais étonnamment pas dénuée de charme pour toi. mais c'est sûrement parce que t'as jamais aimé, ni envié la banalité et les gens fades, transparents. tu les préfères avec cette aura de mystère, de doute, comme celle qui gravite autour du corps maigrelet de ton hôte. tu peux pas lire ce genre de personnes en un regard, il faut leur porter plus d'intérêt, leur montrer qu'ils en ont, au moins à tes yeux. « je m'appelle Alexie, tu peux m'appeler Al, Alex, Lex ou ne pas m'appeler du tout d'ailleurs, je laisse souvent les gens choisir entre ces options » articules-tu dans un souffle, esquissant même un demi-sourire après avoir expirer ta fumée de cigarette. mais par contre, tu peux continuer de me regarder avec tes prunelles océanes. envoûtantes. ouais c'était à peu près tout ce que tu te disais, à ce moment-là, avant de fuir ce regard et de le porter au loin dehors, tirant à nouveau sur ta précieuse. tes quelques mots n'attendaient même pas de réponse, d'autant que s'il avait une gueule de bois moins intrusive que la tienne, il se souviendrait peut-être déjà de ton prénom. quoique. encore aurait-il fallu que tu le lui ais confié la veille au soir ou dans la nuit. rien n'était moins sûr.

Spoiler: