Le plus clair de mon temps, je le passe à l'obscurcir, parce que la lumière me gêne.
- Boris Vian

Orion, elle aspire depuis longtemps à être invisible, elle tente de se fondre dans les paysages, d'éviter le contact humain et la considération d'autrui. Parce qu'en étant invisible, on ne souffre plus que de vieilles blessures, on se donne du répit, le temps de souffler. Si on évite soigneusement de se faire transpercer par la cruelle lame forgée dans les propos malveillants, on protège ce fragile équilibre qui nous permet de ne pas complètement s'effondrer. Orion, elle observe l'horizon parce que ce dernier ne lui veut pas de mal, et quand bien même il le voudrait, elle est inatteignable. Assise en tailleur à même le sol, les paumes immergées dans le sable, elle écoute le silence et l'accueille comme une vieille connaissance qui lui veut du bien. Ce répit auquel elle aspire jusqu'à ce que son horizon se voile par une silhouette qui s'installe là devant, une cheminée d'où s'extirpe de la fumée nicotinée. Orion, elle le sent d'ici, elle a l'odorat fin pour ce genre de choses. Elle voudrait tout de même lui hurler à cette silhouette, ces silhouettes, de quitter les lieux sur-le-champ, puis elle se rappelle que ces lieux, cette vue, tout ça ne lui appartient pas. Elle n'a rien, aucune possession, si ce n'est que ce boulet qu'elle traîne avec elle en permanence. Elle siffle, Orion, pour attirer l'attention, pour voir si elle est aussi invisible qu'elle le voudrait, finalement.
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