Veridis Quo

Il y a trois bonne de semaine de ça, Chiffo s'était garé à proximité de buffalo backpackers beach avec l'espoir d'un point d'encrage pour quelque mois. Il voyait en Banff quelque chose d'assez petit pour ne pas perdre l'esprit, quelque chose d'assez grand pour faire les cent pas à travers les ruelles sans se lasser. Ces cent pas qu'il a fait au moins mille fois depuis qu'il est arrivé là. Chiffo, son van, sa guitare et ces quelques pièces. Chiffo et ce job béni qu'il attendait. Il en avait marre de jouer sur son bout de trottoir, il fait trop froid, les gens ne s'attardent pas. Il a la dégaine, qu'il disait le patron, la dégaine d'un vendeur d’échoppe à souvenir avec sa barbe, ses cheveux fou et toutes ses bagues aux doigts. Ouai, c'est ça, Chiffo a plus l'impression de se trimbaler l'allure d'un prêteur sur gage, d'un vendeur d'arme, mais celle d'un adorable commerçant. Il sourit pourtant, là, avachis près de la caisse, des portes-clés et des cartes postale. Il tapote ses doigts contre le bois et fixe la porte d'entrée d'un air terriblement concentré. Il est en essai Chiffo, il se doit absolument faire bonne impression. C'est que bon, l'allure c'est bien, mais lorsqu'on a pas d'adresse et que l'on refuse d'avoir son vrai prénom inscrit sur un badge, on prend immédiatement l'allure d'un fugitif en fuite. Et c'est un peu ce qu'il est, dans le fond, en fuite.

Tu sais pas trop bien ce que tu cherchais, ce que tu voulais quand t'es montée dans cette voiture, direction n'importe où. Tu mourrais d'envie de voir le monde, de découvrir des gens aux visages lointains, aux regards remplis de voyages. C'est ce qui s'est passé. La ville a finit par devenir cette chambre d'enfant dans laquelle tu te réfugiais gamine. Un sanctuaire. Un endroit mais pas n'importe lequel. Ton endroit. Là dans la rue, tu te sens vivante comme jamais, peut être à cause du froid qui caresse ta peau, ou juste bercée par cette solitude qui t'accompagne à présent si bien. Tu sais pas bien ce tu cherchais Abby, peut etre un refuge, peut être un nouveau départ. Pourtant, planqué derrière tes grands yeux bruns, y a toujours cette vie d'avant, ces visages et ces mots qui te murmure de rentrer. Tu le feras. Un jour, tu partiras d'ici, quand les gens t'auront lassé, quand la beauté du paysage arrêtera de nouer ta gorge avec maladresse. Un jour tu rentreras, mais en attendant, tu te contente de rappeler ton souvenir aux gens d'avant. Aux souvenirs. C'est pour ça que tes doigts poussent la porte de la boutique, pour ça que tu t'engouffres dans cette chaleur rassurante. Bonjour que tu murmures, avant de te diriger droit vers les cartes postales, vers ces paysages sous papiers glacé. C'est moins beau qu'en vrai. Vraiment. Tu sais pas trop bien ce que tu cherches ici non plus finalement.

Il fronce doucement les sourcils le Chiffo lorsqu'il aperçoit la silhouette frêle d'une jeune fille passer le pas de la porte. Il se relève un peu, tire sur son pull et suit doucement ses mouvements du regard. C'est sa première cliente, le premier visage qu'il aperçoit dans le cocon chauffé du magasin. Il en a pourtant aperçu une centaine de figures sur son bout de trottoir mais c'est étrange de se dire qu'on va devoir l’accueillir avec des mots et non pas des notes. Ses cheveux brun lui sont vaguement familier et tendit qu'il s'approche des cartes postales, le Chiffo fouille dans sa mémoire. Un coin de rue, un magasin, la plage, sans doute et peu importe. Salut. Son doigt ripe un peu sur la table. Un bonjour aurait été plus poli. Mais les efforts et Chiffo ne vont pas toujours de paire. Il en a bu pourtant, des tasses de café ce matin pour ne pas avoir l'air trop grincheux. Alors il abandonne sa caisse, glisse ses doigts dans ses cheveux et s'approche un peu. Son dos s'appuis contre contre le comptoir. Vous cherchez quelque chose ? et il ajoute, doucement. Je suis nouveau mais je peux sans doute vous aider.

Ce que tu cherches ? Doucement, tu relève le regard vers cette voix à laquelle tu ne t'attendais pas vraiment. Peut être parce qu'en entrant, perdue ailleurs, t'avais pas entendue sa voix. peut être aussi parce que tu t'attendais pas à le voir approcher si vite. Une ombre silencieuse sur qui tu finis par poser le regard. Par politesse surtout, parce que t'as aucune idée de la réponse qu'il attend, de ce qu'il faudrait que tu lui dise. Alors immobile à côté des cartes postales, t'hausse simplement les épaules en souriant. Les gens qui t'adressent la parole la première fois, ça te rend souvent mal à l'aise. La voix ou plutot le murmure, il ajoute qu'il est nouveau, mais qu'il peut peut être l'aider. Oui, peut être. Je cherche une carte postale, mais une jolie vous voyez ? Pour appuyer tes paroles, tu t'empares d'une carte postale dont l'image incroyablement naïve représente un chaton au slogan accrocheur. Doucement, tu ris. C'est pas ça que tu veux. Quelque chose sans chaton, vous voyez ? Toi tu veux quelque chose de beau. Vraiment.