Mais une douleur s'aseptise-t-elle réellement toute seule ?
La tienne est là. Encore fraiche, encore nouvelle et pourtant si familière. Elle palpite, crépite, comme des braises qu'on essaierait d'éteindre. Mais il y a toujours un vent pour souffler dessus et pour tout rallumer. Tes pas ne te mènent nulle part. À peine arrivée, tu t'es échappée de ta chambre d'hôtel. T'as toujours détesté rester enfermée. C'est ancré en toi, ça aussi. Les grands espaces. L'air pur du dehors, bien trop souvent souillé de tes pensées noires. Autour de toi, le centre-ville cède la place aux quartiers plus défavorisés. Une mélancolie particulière t'étreint alors ; dire que t'as grandi dans des endroits comme ceux-là. Bien loin d'ici, naturellement. Mais contrairement à ce qu'ils croient tous, là-bas, tu ne viens pas d'une bonne famille. Rien de tout ça.
Ça a toujours été un combat. Et depuis peu, ça en est redevenu un. La liberté a un prix.
Tu lui rentres dedans sans même l'avoir remarqué auparavant. Je suis désolée... bredouilles-tu doucement en relevant tes yeux froids et clairs vers lui, d'un anglais rongé par un accent nordique.