faut croire que depuis la dernière escale j'ai plus rien à perdre. plus de carte à jouer. j'suis devenu cette épave sans attache que j'voulais pas devenir. j'suis descendu aux enfers pour ne plus jamais en ressortir. j'ai la gueule morose, la lèvre tombante sur ma clope éteinte et détrempée.
j'ai décidé de m'assoir sur un bout de trottoir, histoire de r'garder la pluie tomber. j'ai pas eu la foi de retourner au camping, j'ai préféré rester là comme un con à suivre du regards les passants, et me maudire de n'pas avoir su prendre le bon chemin. quoi qu'à cette heure ci faut dire que j'ai pas vu grand monde. j'm'en cogne, c'est pas grave. j'suis aussi bien tout seul sur le pavé mouillé.
tiens, un fantôme je pense, en voyant une apparition débarquer depuis l'bout de la rue. "hé toi, t'aurais pas vu une corniche de libre dans le coin ? i'flotte sacrément sur ce trottoir" je hèle, avec l'accent traînant que je me paye depuis que j'suis né.