Elle allait devoir tester l'auberge de jeunesse finalement. Pas que ça ne l'enchantait pas mais pour une première nuit elle aurait aimé avoir un bon et vrai lit, un lit d'hôtel, pas un siège de bus ou ou un refuge de bas de gamme avec cloison en papier maché et ressorts qui grincent. Elle avait de quoi s'en payer une ou deux nuit mais évidement ils n'acceptaient pas les animaux. Ou du moins pas dans les seules chambres libres qui leur restaient.
La nuit commençait à tomber, il était encore tôt pourtant mais silencieuse et envoutante elle accompagna la petite brunette et le chiot sans toit pour le moment errer dans les rues grisâtres. Suivant la lumière des réverbères elle espérait retrouver la rue de l'auberge de jeunesse parmi les embranchements qu'elle avait arpenté de jour.
Bar Harbor semblait calme, les restaurants étaient encore vides, mais au loin on entendait avec force que la vie s'animait à mesure que la nuit s'assombrissait. C'était les basses, c'était les cris, c'était les corps qui se mouvaient, mangeaient, c'était le claquement de ses talons et des pattes du chiot lui arrivaient aux l'oreilles. Un chat miaula au loin. Le chiot semblait ne pas l'avoir remarqué et trottinait toujours autour de Tessa puis d'un coup, il se mit à courir. Ses pattes volaient au dessus des pavés et ses aboyements ricochaient sur les murs.
Épuisée, elle lui courait après. Essouflée, instable elle ne remarqua pas l'homme qui traversait lui aussi la rue, comme les derniers passants qui se dirigeaient elle se concentrait sur le petit chiot. Si au moins elle lui avait donné un nom elle aurait pu l'appeler et il se serait peut-être arrêté. Peut-être. Quelle poisse.
La seconde qui suivit elle heurta celui qu'elle n'avait pas vu et finit le fessier à terre, sur les pavés froids. Il ne manquait plus que ça.
Elle se releva avec souplesse mais grimaçant en défroissant ses vêtements et s'excusa. je suis vraiment désolée, je courrais après mon chien, j'ai pas fait attention. Les mots allaient trop vites, ils s'entrechoquaient les uns sur les autres. Il fallait qu'elle dorme.

Il sait pas. Comment lui dire. Il sait pas, comment lui montrer. Que de son chien, il en a rien à foutre. Et, encore moins de ce chat. Parasite entre ses pieds. Parce que les chiens, il n'aime pas. Les chats. Il n'adhère pas trop non plus. Non. Non, il n'irait pas jusqu'à leur faire du mal. Mais, là, ce soir. Il s'en fout. Peut-être que ça aurait été un autre jour. Il l'aurait ramassé. Le tas de poils. Mais, là. Non. Et puis, que pouvait-il bien en faire de cette chose ? Rien. Il n'allait pas la ramener chez lui. Hors de question. Alors, il la fixe. La fille. D'un air un peu de travers. D'un air un peu mauvais. Pour essayer de lui faire comprendre. Que non. Non. Et non. Il ne s'en occupera pas. Il fait un pas de côté, abandonnant le chat. « Je suis allergique. » Il va pas lui dire cache. Non. Qu'il n'en a rien à foutre. Mais, quand même. Pour le coup. Il veut juste fuir. Juste se barrer.